Nos histoires construisent notre identité et limitent notre confiance en nous.

À longueur de journée, nous nous racontons des histoires sur ce qui se passe dans notre vie et dans les vies des gens que nous croisons. Et certaines des histoires que nous nous racontons créent des obstacles à notre parcours et à notre bonheur.

Car dans ces histoires, il y a des mécanismes qui nous confortent dans nos habitudes, qui freinent notre audace en nous faisant craindre des menaces anticipées. Ces mécanismes empiètent sur la richesse de nos relations et ils sont vecteurs de déceptions et de frustrations vis-à-vis de nous-même.

 

Ces mécanismes se produisent en permanence en chacun de nous. Nous sommes majoritairement conscients de leur présence. Parfois, nous oublions juste que ces histoires ne sont pas complètement vraies. Nous oublions qu’elles ne sont qu’une perspective sur le monde. Une perspective construite sur la base de nos expériences.

Mais pourquoi tant d’histoires ?

Notre cerveau est orienté vers la narration. Nous nous rappelons mieux d’une information si elle est organisée dans une histoire. Il fut même un temps ou tout notre savoir se transmettait par le biais d’histoires.

Que ce soient les lignées familiales, les tactiques de survie, les remèdes médicinaux, les stratégies de recherche de nourriture ou de chasse, la vie des communautés s’est construite et organisée sur base de leurs histoires. Cette construction narrative à permis à notre espèce à s’adapter à son environnement et à évoluer.

Nos ancêtres ont utilisé les histoires pour divertir, enseigner et se souvenir. Mais aussi pour impressionner, négocier, diriger, et réinterpréter les choses. Ils ont appris à utiliser les histoires à leur avantage.

Si nos sociétés se sont construites ainsi, c’est surtout parce que nous avons une prédisposition biologique pour être captivé par les histoires.

Dès l’enfance, nous expérimentons pour survivre. Face à chaque situation, notre corps utilise des neurotransmetteurs, soit pour nous inciter à reproduire notre comportement, soit pour nous inciter à l’éviter. Et face à toute situation nouvelle, nous anticipons quelle sera son dénouement. Et en anticipant nous nous racontons une histoire. Mais notre cerveau ne fait que partiellement la distinction entre ce que nous vivons réellement et ce qui nous nous racontons. Dans les deux cas, nous produisons ces neurotransmetteurs. Nous faisons donc l’expérience de nos vies et de nos environnements dans ce cadre cognitif « narratif ».

« notre espèce animale n’est ce qu’elle est que parce qu’elle se raconte ». - Michel Foucault

Nous avons également un besoin instinctif à lier des faits séparés à une explication. Si nous entendons du bruit dans les fourrés, il en va de notre sécurité d’associer le bruit à la menace d’un prédateur et de nous enfuir. Notre capacité à relier les points, à trouver des modèles significatifs dans le monde, maximise nos chances de survie.

Des histoires interprétatives.

Si ce besoin de lier des faits séparés nous permet de donner un sens à ce que nous percevons, il peut aussi nous induire en erreur et obscurcir notre vision. Car en cherchant à lier les informations différentes, notre cerveau prend des raccourcis ou interprète.

Raconter des histoires nous donnes inconsciemment un sentiment d’ordre. Nous nous sentons plus à l’aise avec des histoires qui nous semblent cohérentes. Cela nous rassure plus que l’expérience du monde tel qu’il est vraiment : la plupart du temps aléatoire, incohérent et imprévisible.

« Chaque personne est une armoire pleine d’histoires, il suffit d’ouvrir les tiroirs, c’est comme un chapelet qu’on égrène. » - Tahar Ben Jelloun

Nous ressentons le besoin de donner du sens à un geste, un comportement, un événement, un accident. Donner un certain sens plutôt qu’un autre à quelque chose, cela veut dire lui accorder un certain prix, une certaine valeur, en fonction de ce qu’il provoque, de ce qu’il suscite en nous.

Mais pour donner du sens à ce que nous expérimentons, notre cerveau comble les vides avec ce qui lui semble le plus logique. Et c’est bien là le risque. De donner à un geste ou un comportement un sens qui n’existe pas, qui n’était pas dans l’intention de l’auteur du geste.

L’interprétation que nous faisons de ce que nous avons vécu, l’histoire que nous nous racontons à son sujet, peut nous faire prêter un sens aux actes des autres, que cela ait été leur intention ou non. Mais ce faisant, nous créons une réalité dans notre esprit qui n’est pas totalement conforme à ce qui s’est réellement passé.

Dans certains cas, nous sommes persuadés que notre interprétation est LA vérité. Et quelles que soient les explications ou les excuses de nos interlocuteurs, nous n’en démordons pas. L’autre nous veut du mal ou ne nous aime pas. Il ne tient pas compte de nos besoins ou se moque de nos sentiments.

Des histoires répétitives et limitatives.

Nous avons tendance à nous fier à notre première impression et à la favoriser face à toute information contradictoire. Nous allons naturellement chercher des preuves qui renforcent les opinions que nous avons déjà, plutôt que de nous exposer à l’incertitude induite par de nouvelles idées ou situations.

Une fois que nous nous sommes fait une opinion sur quelqu’un, nous sommes enclins à jauger ses réactions et ses attitudes sur base de cette croyance initiale. Nous anticiperons également ses réactions sur base de ce postulat et nous adapterons nos comportements et nos attentes à celui-ci.

En agissant de la sorte, nous nous attendons à ce que la relation que nous avons continue sur les mêmes bases et nos comportements favorisent cette répétition. Si le premier contact était positif, cette attente est certainement une bonne chose. Mais si notre premier contact était froid ou conflictuel ? Nous nous préparons à interagir dans le même climat et nous incitons notre interlocuteur à nous répondre sur le ton que nous avons anticipé.

Cela ne veut pas dire que, si nous avions abordé notre interlocuteur de manière neutre ou plus positive, les contacts auraient obligatoirement été différents. Mais au moins, nous aurions laissé la porte ouverte à plus de possibilités.

Des histoires anticipatives.

Et enfin, il y a les histoires que nous nous racontons à l’avance :

  • « Il/Elle ne sera pas intéressée. »
  • « Je vais me ridiculiser. »
  • « Je ne serais pas pris pour ce poste. »
  • « Personne ne me trouvera séduisant(e). »
  • Etc.

Dans bien de nos histoires, nous sommes un héros qui ne croit pas en ses capacités, qui se dit qu’il ne peut pas y arriver, qui doute de tout. Et cela nous incite à abandonner ou à nous engager sur la voie la plus simple.

Une fois que nous nous sommes fixé une limite, nous avons tendance à freiner nos efforts ou à adopter des stratégies qui, au final, ne feront que confirmer nos croyances limitatives.

Devenir conscient de tes histoires.

Les histoires que tu te racontes te donnent un aperçu de tes peurs, de tes désirs et de tes ambitions. Lorsque tu réfléchis à ces histoires, tu peux en apprendre davantage sur toi-même : quelles sont tes valeurs, qu’est-ce que tu considères comme significatif et important.

Et dans chaque situation, tu peux te demander ce que te dicte ton discours intérieur :

  • Quelle est la part interprétée ou anticipée de ce discours ?
  • Quelle est son influence sur ta confiance en toi et ton estime de toi ?
  • A t’il une influence positive sur ton rapport aux autres ?
  • En quoi cette histoire définit ou limite qui tu es ?

Quel est ton niveau d'estime ?

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En répondant à ces questions, tu peux comprendre comment les histoires que tu te crées façonnent ton bonheur, tes relations, tes humeurs, et plus encore. Car lorsque tu laisses tes histoires dicter ta vie, tu t’emprisonnes dans des pensées négatives ou limitantes. Si tu te dis « je suis nul » tu fabriques cette réalité à partir d’une certaine perception de la situation.

Si tu te rends compte que les histoires que tu te racontes ne t’apportent rien de positif, balances les.

Tu verras que, sans ces histoires, il y a simplement la réalité physique du monde qui t’entoure. Il n’y a que toi et le moment présent. Et cela libère ton potentiel et ouvre les possibilités.

« Les vérités inhérentes à tout récit personnel naissent d’un véritable ancrage dans le monde, dans ce qui fait la vie - les passions, les désirs, les idées, les systèmes conceptuels. Les récits personnels des individus sont autant d’efforts pour saisir la confusion et la complexité de la condition humaine. » - Ruthellen Josselson

Change tes histoires pour gagner en confiance.

Voici la partie la plus excitante. Une fois que tu es conscient de ta tendance à te raconter des histoires, tu peux l’utiliser à ton avantage.

Raconter des histoires est naturel et nous le faisons tous, tout le temps. Il n’y a rien de mal à cela. En réalisant à quel point nous sommes enclins à raconter des histoires et à les croire, tu es en mesure d’en créer de nouvelles.

Changer tes histoires pourrait te paraître difficile. Elles semblent si solides et si réelles que nous n’arrivons pas à nous en détacher. Pourtant, prendre du recul vis-à-vis de celles-ci, et, pourquoi pas, les considérer de la même manière que nous considérons nos rêves, nous permet de nous détacher de nos jugements et de nos limites.

En changeant tes histoires, tu changeras ta façon de voir le monde et tu te choisiras une nouvelle place en son sein.

Sois le héros ou l’héroïne de tes histoires, celui ou celle qui ne se décourage pas face à l’adversité, celui ou celle qui n’est pas dissuadé(e) par les tracas de la vie, celui ou celle qui triomphe contre vents et marées. Mais aussi, celui ou celle qui fait preuve d’audace, qui va vers les autres et qui n’a pas peur de demander de l’aide. Enfin, sois celui ou celle qui ose développer son potentiel.

« Le bonheur appartient à ceux qui se racontent de succulentes histoires et qui ont la ressource - ou le courage - d’y croire ! » - Alexandre Jardin

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