Comprendre l'estime de soi pour avoir une bonne estime personnelle.
On entend souvent dire que l’estime de soi est, plus que jamais, considérée comme une nécessité pour survivre dans une société de plus en plus compétitive.
Aujourd’hui, je te propose de faire un état des lieux des connaissances psychologiques actuelles sur l’estime de soi.
Qu’est-ce que l’estime de soi ?
L’estime de soi, c’est, d’une part, comment on se voit et, d’autre part, le fait que l’on aime ou non ce que l’on voit de nous-mêmes.
L’estime de soi est une donnée fondamentale de la personnalité, placée au carrefour des trois composantes essentielles du Soi :
- Elle est d’abord émotionnelle, car elle dépend de notre humeur, de notre état émotionnel, et elle l’influence fortement en retour. - Elle est ensuite comportementale, car elle influence notre capacité à l’action (ou, pour dire autrement, notre confiance en nous) et se nourrit en retour de nos succès. (voir l’article sur les différences entre confiance en soi et estime de soi) - Enfin, elle est cognitive car elle dépend étroitement du regard que nous portons sur nous, tout en le modulant à la hausse ou à la baisse.
Avoir une bonne estime de soi est important, que ce soit pour actualiser ton potentiel ou pour entretenir des relations égalitaires.
Une ou des estimes de soi ?
Parler d’estime(s) de soi présente les mêmes difficultés que de parler d’intelligence(s) : la diversité de leurs sources et de leurs manifestations, tant de l’intelligence que de l’estime de soi, les rendent toutes deux particulièrement difficiles à cerner clairement. Tout comme il existe plusieurs formes d’intelligence, l’estime de soi semble être la résultante de plusieurs composantes.
Selon Christophe André, elle recouvre au moins cinq dimensions chez l’enfant :
- l’aspect physique (« Suis-je grand, petit, beau … ? »)
- la réussite scolaire (« Ai-je de bonnes notes ? »)
- les compétences athlétiques (« Est-ce que je cours vite, saute haut, suis fort(e)… ? »)
- la conformité comportementale (« Les adultes m’apprécient-ils, est-ce que je réponds à leurs attentes ? »)
- la popularité (« Est-ce que les autres m’aiment bien ? »).
La distribution de ces dimensions n’est habituellement pas homogène : tel enfant peut présenter une estime de soi élevée dans les domaines des résultats scolaires, de la popularité et de la conformité, mais avoir une piètre image de lui quand il s’agit dévaluer son apparence physique et ses compétences athlétiques.
Ces dimensions sont similaires chez l’adulte : pour t’y reconnaitre, il te suffit de remplacer la réussite scolaire par le statut social. Petite particularité pour les compétences athlétiques : elles sont peut-être un peu moins importantes chez l’adulte. A moins de vivre dans certains contextes, tel qu’exercer un métier manuel ou physique, la majorité d’entre nous n’a besoin d’évaluer ses aptitudes athlétiques que durant des périodes plus courtes (durant les vacances, pendant la pratique d’un sport… surtout si ce contexte prévoit une tenue vestimentaire dévoilant un peu plus le corps). Tes compétences athlétiques n’ont finalement pas beaucoup d’importance durant un repas de famille ou lors d’une réunion au boulot.
Mais une estime de soi élevée dans telle ou telle composante peut être soit fragile, soit solide. Une estime de soi élevée et fragile (que je nommerai également estime gonflée) peut, par exemple, être trop dépendante de facteurs non contrôlables (événements,succès, beauté…), ce qui la rend vulnérable lors d’événements négatifs.
Dans le cas d’une estime gonflée, le besoin de maintenir une estime de soi positive peut parfois avoir un coût négatif. L’estime gonflée peut amener la personne à discréditer les retours négatifs (les considérer comme non fiables et biaisés). Cela peut aussi l’amener à minimiser les échecs ou les attribuer injustement à des causes externes. De cette manière la personne à l’estime gonflée a tendance à se créer un mythe sur ce qu’elle est et ce dont elle est capable. Immanquablement, il arrivera un moment ou elle devra confronter son mythe à la réalité et la chute risque d’être douloureuse. Cela peut également l’amener à faire comparaisons sociales faussement désavantageuses pour son entourage, ce qui l’amènerait à être hautaine (supérieure) voire blessante (dénigrante).
Il y a un autre phénomène cognitif auquel tu dois également faire attention : l’importance accordée à chacune de ces composantes par ton entourage. Être né dans une communauté où le statut social a beaucoup d’importance, va par exemple te conduire à donner plus de poids au diplôme que tu as obtenu et au métier que tu exerces. Par contre, une de tes connaissances ayant fait les mêmes études et exerçant exactement le même métier peut peut-être les prendre moins en compte si il vit dans une communauté où cela n’a pas d’importance. De cette manière, ton estime personnelle sera probablement plus élevée que la sienne si ce métier/diplôme est considéré comme prestigieux mais ton estime sera moins élevée dans le cas d’un métier/diplôme peu valorisant.
La comparaison sociale.
Quoi que l’on en dise, le fait de se positionner et de se comparer aux personnes de son environnement immédiat est un des mécanismes fondamentaux dans l’ajustement de notre estime personnelle.
Selon une étude de Suls, J., Lemos, K., et Stewart, H. L., il semble être capital de se percevoir comme étant « au-dessus de la moyenne » (« better than average effect ») Cette étude révèle quelques chiffres:
- 70 % des élèves d’écoles renommées pensent avoir des capacités au-dessus de la moyenne.
- 90 % des hommes d’affaires se considèrent comme supérieurs à l’homme d’affaires moyen.
- 90 % des enseignants s’estiment supérieurs à leurs collègues.
Cet effet bénéficie également un peu aux proches : la plupart des personnes ont tendance à se considérer légèrement meilleurs que leurs amis, mais ils ont nettement plus d’estime pour ces amis que pour la plupart des gens. D’une certaine manière, nous avons besoin de considérer être entouré et apprécié de personnes également estimables pour pouvoir nous sentir estimables…
Pourtant, la comparaison sociale à tendance a augmenter le biais que nous avons vis-à-vis de nous-mêmes : les personnes à haute estime de soi se comparent plus facilement vers le bas (et ce, même lorsqu’elles doutent, elles vont se dire « Il y a moins bien que moi ») tandis que ceux à basse estime de soi se comparent vers le haut (même lors de leurs réussites, elles vont se dire « Beaucoup sont meilleurs que moi »). Dans les deux cas, cette comparaison à un effet cumulatif:
- la personne ayant une bonne estime entame ou entretient une spirale vertueuse.
- la personne ayant une estime faible entame ou entretient une spirale négative.
L’estime de soi est-elle un sociomètre ?
Un certain nombre de chercheurs considèrent que l’estime de soi est avant tout le reflet de notre sentiment de popularité et d’approbation par autrui. Pour eux, le niveau d’estime de soi est étroitement lié aux expériences subjectives d’approbation ou de rejet par l’entourage. Ils comparent dès lors l’estime de soi à un « sociomètre » : plus la personne pense qu’elle est bien considérée et appréciée par les autres, plus cela améliore son estime personnelle.
Le « sociomètre » présente pourtant quelques failles : l’influence du regard des autres sur l’estime de soi est plus grande pour nous tirer vers le bas que pour nous tirer vers le haut. Une expérience de psychosociologie le souligne : des volontaires étaient affectés à un travail à effectuer en groupe ou individuellement, et l’on mesurait leur niveau d’estime avant et après ce travail. On a fait croire à la première moitié des participants que ce choix était volontaire : « Tu as été choisi par les membres du groupe pour travailler avec eux », ou « Tu as été refusé par les membres du groupe, et tu travailleras donc seul ». On annonçait aux autres participants que le choix était fait par tirage au sort. Les participants à qui on avait annoncé les avoir assignés au hasard ne présentaient pas de variation de leur niveau d’estime avant et après l’expérience. Chez ceux qui croyaient que la décision venait du groupe, le fait d’avoir été choisi n’amenait qu’une petite augmentation de leur estime personnelle, alors que le fait d’avoir été exclu l’abaissait plus nettement.
Être choisi ne fait donc que rassurer, mais être exclu déstabilise bien plus. Cela mets en lumière l’impact que peuvent avoir les sessions de selection des membres des équipes de sport ou de jeux dans les cours de récréation. Ne pas être pris ou être choisi en dernier est souvent un cruel rappel de sa faible valeur aux yeux du reste du groupe.
En allant plus loin, on se rend compte que le fait d’être apprécié compte plus que le fait d’être performant. Pour cette raison, l’estime de soi d’un élève populaire auprès de ses camarades est donc globalement plus élevée que celle du premier de la classe.
Estime de soi et adaptation à l’environnement
Une bonne estime de soi te permet d’adopter des stratégies de résolution de problèmes plus adaptées : tu vas plus facilement rechercher de soutien (conseils et réconfort) auprès de tes proches, tes remises en question seront plus mesurées et tu te confronteras plus facilement à la réalité. Tandis que la personne dont l’estime de soi est faible adopte des stratégies inverses : elle se repliera sur-elle même, aura plus de réticence à parler de ses soucis, elle aura tendance à éviter le problème. Elle pourrait également dénier les difficultés ou faire une autocritique excessive…
Mais également, une bonne estime personnelle augmente tes capacités d’auto-contrôle. L’auto-contrôle, c’est ta capacité à t’engager dans des stratégies (entamer un régime) qui vont t’apporter des bénéfices à long terme malgré l’absence de bénéfice à court terme (pas de résultats visibles immédiatement), voire même des inconvénients immédiats (se priver d’en-cas dont on raffole).
L’optimisme est également un trait de caractère ayant une grande influence sur l’estime de soi. Le fait de voir la vie de manière optimiste va augmenter ta confiance. Va augmenter ta capacité d’imaginer que tu as les ressources nécessaires pour faire face comportementalement (si l’événement est contrôlable) ou émotionnellement (si l’événement ne dépend pas de toi).
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À quoi sert l’estime de soi ?
Une des premières fonctions de l’estime de soi, concerne la confiance en soi (ta capacité à t’engager efficacement dans l’action). Une bonne estime de toi, qui n’est donc ni faible ni gonflée, génère des croyances sur tes capacités à agir et réagir. C’est sur ces croyances que tu vas te baser pour te décider ou non de passer à l’action.
Une faible estime de soi face à l’échec nous fait penser que celui-ci est dû à des causes internes (« C’est de ma faute »), globales (« Cela prouve que je suis nul ») et stables (« J’échouerai encore la prochaine fois»). Une bonne estime de toi va plutôt te faire attribuer l’échec à des causes externes (« Je n’ai pas eu de chance »), spécifiques (« Je reste quelqu’un de valeur ») et instables (« Après la pluie vient le beau temps »). Comme dans le cas de la comparaison, ces deux dynamiques s’auto-entretiennent :
- la première dynamique pousse la personne à entreprendre aussi peu que possible, par peur de l’échec. Elle atteint donc moins souvent des réussites (accompagnées de gratifications), ce qui l’amène à douter davantage, ce qui l’incite à prendre moins de risques.
- la seconde dynamique t’incite à multiplier les actions, qui peu à peu vont nourrir et consolider ta confiance personnelle et ton estime.
La seconde fonction de l’estime de soi est l’auto-évaluation. Toute personne procède à des auto-évaluations permanentes et majoritairement inconscientes. Le lien entre cette auto-évaluation et l’estime de soi est fort, très fort. Lorsqu’une personne à faible estime de soi est invitée à se décrire, elle se montre prudente et hésitante, préférant les qualificatifs neutres aux qualificatifs positifs. Souvent, il y a tellement de prudence et d’hésitation que cette description est floue. Pourtant, lorsqu’on leur demande de décrire des proches, ces difficultés sont beaucoup moins présentes, preuve que c’est une particularité de leur vision sur elles-mêmes. Une bonne estime personnelle va t’amener à t’exprimer à ton sujet en des termes plus affirmatifs et plus catégoriques. Tu auras également moins de réticences à exprimer un avis qui n’est pas celui de tes interlocuteurs.
Le troisième rôle de l’estime de soi est de favoriser la stabilité de notre bien-être émotionnel. Confrontés à un échec, nous allons tous avoir des réactions affectives immédiates (de la tristesse, du découragement et du désarroi…) d’intensité équivalente quel que soit notre niveau de confiance personnelle. Ce qui va changer par contre, c’est la durée de ces réactions affectives : un bon niveau d’estime personnelle va te permettre de « remonter la pente » beaucoup plus vite. En augmentant notre capacité de résilience, l’estime de soi fonctionne comme la double coque d’un voilier : celui-ci aura beau prendre l’eau ou se retourner, il ne coulera pas car cette double coque assure sa flottaison. Les opérations nécessaires pour le remettre en route seront bien plus simples que pour une simple coque qui aurait très probablement coulé.
« Ne laisse jamais personne te dire ce dont tu n’es pas capable. C’est à toi de choisir et de vivre ta vie.» - Laurent Gounelle.
Finalement, nous pourrions comparer l’estime de soi à un « système immunitaire du psychisme » : tout comme notre immunité biologique nous protège des agressions microbiennes ou virales, une des fonctions de l’estime de soi serait de nous protéger de l’adversité.
Pour terminer, maintenant que tu sais un peu mieux comment fonctionne ton estime personnelle, je t’encourage à continuer à aller de l’avant. Ces quelques infos devraient te permettre de le faire un peu plus facilement.
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